Escapade en Asie Centrale : être ronde en Ouzbékistan.

Pour l’une de nos premières escapades, nous avons choisi de vous emmener dans un pays malheureusement mal connu, l’Ouzbékistan, pour voir comment y vivent les rondes. Ce pays sympathique, ancienne république soviétique grande comme la France, se situe au nord de l’Afghanistan, à près de 7 heures d’avion de chez nous.

On l’associe bien souvent à d’anciens monuments aux coupoles bleues, témoins d’un âge d’or de l’architecture islamique, à la route de la soie et bien sûr à la ville légendaire de Samarcande (voir la photo de la place du Reghistan ci-contre).

L’Ouzbékistan est un pays musulman très modéré et très tolérant, bien loin des tableaux caricaturaux que l’on peut faire de ces pays. Là-bas très peu de femmes voilées, alors qu’on se trouve vraiment tout près de l’Iran ou de l’Afghanistan. Beaucoup de jeunes femmes n’hésitent pas par contre à se promener en mini-jupe.

La vie est calme en Ouzbékistan, la population cherchant avant tout à travailler et à assurer la survie des familles. La vie sociale locale est intense, rythmée notamment par les mariages, prétextes à de grandes fêtes, où il n’est pas rare d’inviter plusieurs centaines de personnes. Un quartier tout entier va faire la fête parce que l’une des familles marie ses enfants.

Les familles sont nombreuses, ce qui signifie des maternités à répétition pour les femmes. Une majorité d’entre elles ne travaillent pas, restent à la maison et s’occupent de leurs enfants. Ce mode de vie,

auquel s’ajoute une nourriture traditionnelle souvent trop riche et trop grasse dès que les moyens de la famille le permettent entraîne fréquemment des problèmes de surpoids.

Les femmes sont souvent très jolies, avec de longs cheveux noirs, un teint un peu mat et des yeux en amandes, car nous sommes déjà en Asie. Ces beautés se fanent parfois prématurément, conséquence d’un mode de vie un peu dur pour elles.

Il est intéressant de remarquer que cette évolution dans la vie de la femme est une norme et qu’elle ne s’accompagne donc d’aucun jugement social. Personne ne jugera une femme ronde. Jamais elle ne se sentira exclue à cause de son poids, jamais elle ne sentira peser sur elle le regard des autres.

Certaines professions sont plus exposées que d’autres, comme les crémières du bazar de Tachkent, que l’on voit ci-dessous.

Les hommes suivent bien souvent un chemin parallèle à leurs compagnes. Dans un groupe de quadras, hommes et femmes seront la plupart du temps en situation de surpoids et, ce qui est magnifique c’est que cette question n’effleurera l’esprit de personne : les gens se sentent bien comme ça et c’est tout.

Un de mes amis, un Français qui vivait localement avait décidé de faire un régime ; dès que son associé ouzbèk en a eu vent, il lui a interdit d’en parler : personne n’allait comprendre ! Le nom familier d’un ventre un peu proéminent chez un homme est « l’autorité ». Il n’aurait pas fallu la perdre…

En outre, on remarque également une certaine corrélation entre le statut social et le tour de taille, tant chez les hommes que chez les femmes. Les représentants du pouvoir, ministres, gouverneurs, ou de l’argent, hommes d’affaires locaux sont rarement sveltes. Leurs épouses non plus, pas plus que les quelques femmes jouant un rôle direct dans la vie publique locale.

Les rondes, que d’ailleurs personne ne penserait à appeler comme ça là-bas, n’ont guère de choix pour s’habiller en grandes tailles. Pour les moins favorisées, ce sera une robe traditionnelle, en principe en coton, souvent multicolore.

Pour les grandes occasions, cette robe sera en soie avec un tissage satiné, bigarré, aux couleurs qui se fondent les unes dans les autres, unique en son genre, le « Khan Atlass », issu d’une technique de tissage traditionnelle utilisée sur des métiers à tisser très spécifiques, que les Ouzbèks ne montraient qu’avec une grande réticence.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le résultat est certes intéressant, comme on peut le constater sur la robe de mariée ci-dessous, mais difficile à adapter au goût occidental, sauf peut-être en utilisant ce tissu par petites touches.

Les femmes qui ont un peu plus de moyens s’habillent souvent à l’occidentale et, soit ont recours aux services de couturières privées, soit achètent leurs vêtements dans le seul magasin local spécialisé dans les grandes tailles. Par rapport aux goûts européens, elles préfèrent les couleurs vives et sont souvent très élégantes, notamment pour pouvoir paraître lors des nombreuses fêtes qui rythment la vie du pays, surtout à la belle saison.

Comme il y a une certaine corrélation entre l’âge et l’embonpoint, ces femmes, qui ont vécu la plus grande partie de leur vie sous le régime soviétique, et donc ont eu leurs goûts marqués par cette période, restent souvent classiques dans leurs choix, d’autant plus que la société ouzbèke est dans son ensemble assez conservatrice. Pour ces raisons et malgré l’absence de préjugés sociaux, le vêtement sera plus utilisé pour masquer que pour mettre en valeur, pudeur oblige.

En bref, la vie des rondes semble plus facile en Ouzbékistan qu’en Europe. Elles sont acceptées telles qu’elles sont et vivent en complète intégration dans leur milieu familial et social. Malgré toutes les certitudes qui nous habitent, nous autres Européens, on peut parfois se demander si c’est bien toujours à nous de donner des leçons.

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